Dès que l’on franchit la porte de l’atelier Rookyto, situé dans la ZAC Larrigan de Seignosse, on respire l’odeur du cacao, de la torréfaction et de la passion. Ici, pas de lignes industrielles ni d’ingrédients mystères : tout se fait à la vue du visiteur, selon un modèle militant où chaque geste, chaque mesure a un sens. C’est la renaissance d’une chocolaterie artisanale bean‑to‑bar, digne des 400 artisans que recense l’INSEE, sur les 4 000 chocolatiers que compte la France.
Chloé, née en Californie, et Romain, originaire de France, sont ingénieurs agronomes et partageaient tous deux l’amour du cacao avant même de fonder Rookyto. C’est en travaillant ensemble dans une chocolaterie vietnamienne que leur complicité a mûri. Alors qu’ils travaillaient dans le grenier d’une maison à Boonville, quatre mètres carrés ont suffi à lancer l’école Rookyto : l’exigence, la gourmandise et un militantisme économique discret, mais solide.
Transparence, torréfaction, terroir
À Seignosse, le duo a troqué quatre mètres carrés contre les installations des Ateliers de Larrigan. Le torréfacteur italien Azul, « parfaitement calibré pour sublimer le cacao », a remplacé le four pâtissier improvisé. Azul consomme peu d’énergie et « malgré sa petite taille, il a un gros appétit, il avale 18 kg de fèves à la fois, toutes les 20 minutes ! », précise Romain.
Après la torréfaction, viennent le broyage sur meule de granite, le conchage, le tempérage pour garantir brillance et snap, puis le pressage hydraulique, étape essentielle pour isoler le beurre de cacao de la poudre. En fin de chaîne, les chocolats sont moulés, emballés et étiquetés. Tout cela sous le regard des clients invités lors des visites-ateliers. Le déchet, à savoir les pellicules, est composté. Et toute la chaîne reste volontairement courte.
Partisanat et équité
Rookyto ne se contente pas de produire du chocolat : il traque les filiations, les pratiques, la justice agricole et humaine. Leur « partisanat », comme ils l’appellent, repose sur trois piliers : diversité, authenticité, transparence.
Diversité, d’abord, car les fèves viennent de deux partenariats bien calibrés : Izabal Agroforest au Guatemala et Marou au Vietnam. Le premier œuvre en agroforesterie sur des terres re‑boisées, préservant la biodiversité et le climat. Le second, pionnier « bean‑to‑bar », achète en direct à des petits producteurs du Mékong et défend une agriculture paysanne, multi-cultures et pérenne. Une sorte de “compas” pour un cacao solidaire.
Authenticité, ensuite : chez Rookyto, on travaille exclusivement des ingrédients bruts, sans purées, ni poudres secondaires, ni arômes artificiels. Le goût variera légèrement selon les récoltes, car on laisse la nature parler.
Transparence, enfin, car les Partisans Chocolatiers s’engagent à tracer chaque origine, chaque pratique agricole, chaque collaborateur. Pas de chaîne opaque : les clients savent d’où vient le cacao, comment il a été cultivé, par qui.
Créations engagées et gourmandes
« Le cacao est un vecteur d’émotion, le chocolat un acte citoyen. » Fidèles à cette vision, Chloé et Romain créent des recettes saisonnières inspirées par la région et les producteurs voisins. Pour l’hiver 2025, un bonbon au chocolat 75% enrichi de camerise a vu le jour. Ce petit fruit cultivé à Tyrosse, riche en antioxydants et acidulé, s’associe parfaitement à une ganache noire. « la camerise est à retrouver chez Café Graines, dans un bonbon révélant nos deux métiers : partisans chocolatiers et producteurs de petits fruits bio », se réjouit Romain.
L’union de cet esprit local avec des fèves de terroirs lointains donne naissance à un chocolat engagé, enraciné dans un monde global. Chaque dégustation devient un vote pour une économie plus humaine.
Rookyto, c’est aussi le refus d’un modèle alimentaire “incinérateur” de cultures, de biodiversité et de justice sociale. L’agroforesterie à Izabal permet de régénérer le sol, d’assurer des revenus sains et stables aux communautés. Au Vietnam, Marou garantit une production paysanne diversifiée, non dirigée vers des monocultures industrielles. Soutenir ces initiatives, c’est voter trois fois par jour pour un monde durable, disent les fondateurs.
Dans un monde où l’alimentation est souvent teintée de cynisme, Rookyto incarne une alternative : terre d’influence sur l’assiette, force tranquille du chocolat de demain.
Rookyto - Partisans Chocolatiers est un manifeste. Un reflet de convictions, un déploiement de valeurs transformatrices, mises en œuvre à chaque étape : du choix des fèves à la dégustation finale. Ce chocolat, fait autrement, invite à plus qu’un plaisir gustatif : un engagement tranquille, responsable, généreux… avec le monde. Une révolution douce, à croquer.
COUP DE POUCE
Si vous cherchiez une bonne excuse pour croquer dans un chocolat d’exception, en voilà une toute trouvée : soutenir Rookyto, c’est bien plus que céder à la gourmandise. C’est faire le choix éclairé d’un chocolat qui a du sens, de la conscience et du caractère. Derrière chaque tablette, chaque ganache ou bonbon fruité, se cache un duo de passionnés qui torréfient, conchent et moulent à la main, en pleine zone artisanale de Seignosse, des fèves venues de l’autre bout du monde mais chargées de valeurs locales.
Chloé et Romain ont bâti leur atelier comme un manifeste à ciel ouvert pour un chocolat fait autrement : avec transparence, avec engagement, avec l’envie de nourrir les corps autant que les consciences. Leur démarche artisanale, leur proximité avec les producteurs de cacao au Guatemala et au Vietnam, leur amour du goût franc et du travail bien fait méritent qu’on leur donne un coup de pouce.
Et le meilleur coup de pouce que vous puissiez leur offrir, outre partager cet article sur vos réseaux sociaux, c’est de pousser la porte de leur atelier, de découvrir leurs créations, et de goûter, vraiment goûter, à ce que peut être un chocolat militant, vivant, et inoubliable. Parce que soutenir Rookyto, c’est devenir soi aussi Partisan Chocolatier, le temps d’une bouchée, d’une balade, ou d’un moment suspendu.
Sébastien Soumagnas
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